Depuis plusieurs années, l’État français a mis en place une série de réformes fiscales, dont la
suppression de la taxe d’habitation (23 milliards d’euros) et de la
CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, 11 milliards d’euros), qui ont affecté les recettes des collectivités territoriales. Pour compenser ce manque à gagner, l’État a recours à des
déficits budgétaires, une stratégie critiquée pour son impact à long terme.
Cependant, au lieu d’assumer seul cette responsabilité, l’État fait désormais peser le fardeau sur les
collectivités territoriales, en particulier les
régions, en leur imposant un prélèvement de
3 milliards d’euros. Cette décision devrait pénaliser la région Auvergne-Rhône-Alpes, grevant son budget de près de
120 millions d’euros. Cet ajustement se décompose en deux points :
- 50 millions d’euros liés à la non-actualisation des recettes compensatoires des impôts locaux.
- Un prélèvement de 2 % sur les recettes régionales, soit environ 60 à 70 millions d’euros supplémentaires.
Une gestion régionale en contradiction avec les objectifs de mobilité
L’un des premiers reproches adressés à la gestion régionale est lié aux
priorités budgétaires, notamment dans le domaine des transports. La région Auvergne-Rhône-Alpes se distingue par des choix qui favorisent les
infrastructures routières au détriment du ferroviaire, pourtant une compétence clé de la région.
Dans le cadre du
CPER 2021-2027, la région prévoit de consacrer
300 millions d’euros aux routes, contre seulement
131 millions d’euros pour le ferroviaire, soit plus du double pour les routes. Ce choix est d’autant plus surprenant que
les TER sont de plus en plus saturés, et les besoins en matière de transport ferroviaire ne cessent d’augmenter. En parallèle, la nouvelle convention TER (2024-2033) consacre
590 millions d’euros par an à la SNCF, une baisse notable par rapport aux
656 millions d’euros de la précédente convention. Cette diminution des fonds alloués aux TER pourrait aggraver les conditions de transport pour les usagers.
Une baisse drastique de la formation professionnelle
La région Auvergne-Rhône-Alpes affiche également un
désengagement préoccupant dans le secteur de la
formation professionnelle. Le budget dédié à cette compétence a été réduit de
320 millions d’euros à
147 millions d’euros, avec seulement
18 euros par habitant investis, contre une moyenne nationale de
46 euros. Cette réduction des investissements place la région en queue de peloton dans ce domaine essentiel pour l’emploi et la compétitivité de la population locale.
Un soutien culturel en déclin
Le secteur
culturel est lui aussi touché par des restrictions budgétaires. Alors que d’autres régions, comme les Hauts-de-France, investissent environ
17,67 euros par habitant dans la culture, la région Auvergne-Rhône-Alpes se limite à
8,39 euros, soit
moins de la moitié de la moyenne nationale. Entre
2022 et 2023, le budget alloué à la culture a encore baissé de
4 millions d’euros, un choix critiqué par les acteurs culturels et les habitants de la région.
Un désengagement du soutien aux quartiers prioritaires
Sur le plan social, la région a
supprimé complètement son soutien au fonctionnement des
quartiers prioritaires de la politique de la ville, passant de
3 millions d’euros à
zéro. Cela prive les habitants des zones les plus défavorisées de la région de plus de
20 millions d’euros d’aides, exacerbant les inégalités.
De plus, la gestion des fonds dédiés à l’
éducation favorise disproportionnellement les
lycées privés. Depuis
2017, le budget alloué aux lycées privés a augmenté de
212 %, contre
68,5 % pour les lycées publics, avec un
indice d’évolution deux fois plus élevé pour le privé que pour le public.
Des dépenses de communication démesurées
Enfin, l’
allocation des fonds publics soulève des interrogations, notamment concernant les dépenses de
communication. Le budget de la communication régionale a augmenté de
22 millions d’euros à 36 millions d’euros, une somme jugée disproportionnée par rapport à d’autres priorités. Par ailleurs, la région est accusée de
favoritisme, car le bulletin régional n’est envoyé qu’aux habitants des
communes de moins de 10 000 habitants, excluant ainsi une grande partie de la population, en particulier les zones urbaines.
Un traitement de faveur pour certains départements
L’un des aspects les plus critiqués de la gestion régionale concerne la répartition des fonds selon les départements. Par exemple, la
Haute-Loire, un département représentant moins de
3 % de la population régionale, a reçu
28 % des montants alloués dans le cadre des
contrats de contreparties d’image entre
2018 et 2023, soit
689 000 euros. Pendant ce temps, des départements plus peuplés comme l’
Ain, la
Drôme ou l’
Isère ont reçu une part plus faible des subventions.
La gestion budgétaire et les priorités politiques de la région Auvergne-Rhône-Alpes soulèvent de nombreuses questions, tant sur les
choix d’investissement que sur la répartition des ressources entre les différents secteurs et départements. Alors que les défis en matière de
mobilité, de
formation professionnelle et de
cohésion sociale sont majeurs, la région semble privilégier des dépenses qui ne correspondent pas toujours aux
besoins réels de ses habitants. Ces décisions risquent d’accentuer les inégalités et de freiner le développement de la région.